(LE
CHEF DE CHŒUR :) " Je ne commanderai point de meilleur soldat Que celui
que tu fus, Ne baisse pas ta garde et reste auprès de moi, Ju- -das.
" (LE
CHŒUR :) " Juuuuu-das ! " (CHEVAL
2 :) Ce qu'il faut d'énergie pour survivre, ça te dépasse. Il faut que tu y
ailles ; tu répètes : " Faut que j'y aille ", tu sens que ta voix traîne, hésite,
se perd ; allez, lève-toi. " Merci, hein. " Tu es un garçon poli, même avec les
Mexicains qui posent les bonnes questions. Tu prends ta valise ; il ne faut jamais
oublier sa valise, ni ses carnets, sans quoi il finit toujours par vous arriver
des ennuis, c'est une des lois incontournables de la nature humaine… Tu n'es pas
un lâche, ni un lapin, tu n'es le lapin de personne ; tu es une bosse sur le front
du siècle finissant. Tu es un fauve ; non, tu es la jungle où se tapit le fauve.
Tu es tout un enchevêtrement de lianes qui pointent vers quelque part, de l'autre
côté de l'arc-en-ciel. Tu n'es surtout pas un lâche. Tu es juste un tableau qui
aurait trouvé son point de fuite. Tu es une drôle d'affaire à toi tout seul, et
tu aimes cette idée-là ; tu es un grand vilain canard ; un méchant loup. Les
heures qui viennent de s'écouler t'ont l'air étrange ; à bien y réfléchir, leur
étrangeté contamine aussi les années qui précèdent. Tu es tout contaminé, et tu
sens bien que tu es ton propre antidote. Tu dis tout et n'importe quoi. Tu es
tout et n'importe quoi. Tu te sens comme on se sent après avoir été sur le
point de jouir sans y être parvenu. Tu reconnais d'ailleurs que tu n'as jamais
bien su donner dans la jouissance. Et tu n'as jamais fait de mal à personne ;
personne, personne, personne. Tu n'étais rien ; ou plutôt : tu ne t'étais que
trop éloigné de toi-même ; fourvoyé. " Et toute ogive morte sous-marine encore.
" Et puis peut-être bien que tu es en train de devenir un homme. |